Politique
Entre l’Etat haïtien et la Sogener, la bataille devient frontale
Entre l’Etat haïtien et la Sogener, la bataille devient frontale. Le conflit prend de l’ampleur. Après avoir annoncé la suspension du contrat avec la compagnie d’énergie, l’administration Moïse/Lapin adopte de nouvelles mesures. Lundi 4 novembre, dans une note du bureau du secrétaire d’Etat à la Communication, le gouvernement a appelé la Banque de la République d’Haïti (BRH) à suspendre la lettre de crédit émise en faveur de la Sogener, dans le cadre du contrat de fourniture d’électricité à l’ED’H.
« En conséquence, il est fait injonction et défense formelles à la Banque centrale d’avoir à cesser tous paiements, surseoir, dès réception de la présente, à toute obligation découlant de cette dite lettre de crédit, ce, jusqu’à ce qu’il en soit décidé autrement », a écrit l’exécutif. Cette décision, souligne la note du secrétaire d’Etat à la Communication, peut être prise soit par règlement par la voie à l’amiable entre les parties en cause, soit par une décision de justice relative à la lettre de créance en référence.
« La BRH se doit également de surseoir à toute renégociation ou obligation s’écoulant de cette dite lettre de crédit, jusqu’à ce qu’il en soit décidé autrement soit par un règlement à l’amiable entre les parties en cause, soit par une décision judiciaire passée en force de chose jugée ou souverainement jugée », informe le gouvernement. Le Secrétaire d’Etat à la Communication rappelle que ce document précise en outre qu’à la lumière du rapport de la Commission de renégociation des contrats d’achat d’électricité, la Sogener, à travers cette lettre de crédit, serait coupable de plusieurs cas de surfacturations et de paiements indus par l’ED’H, totalisant 123 millions de dollars, de 2007 à 2015.
D’un autre côté, le gouvernement a décidé également de sommer la Sogener de restituer à l’État haïtien, une somme de 123 millions de dollars américains. En ce sens, une sommation a été adressée hier lundi à la compagnie, afin de corriger incessamment ce que l’équipe en place appelle « les cas de dol, d’escroquerie et d’abus de confiance » dont l’État a été victime dans le cadre des contrats passés.
« L’État haïtien à travers la DGI, accorde un délai de 48 heures à la Société Générale d’Energie pour restituer au Ministère de l’Économie et des Finances, le montant évoqué », dit la Secrétairerie d’Etat dans une autre notre rendue publique le même jour. Passé ce délai, le gouvernement souligne que la compagnie devra payer les 10% relatifs aux frais d’avocats, sans compter les éventuelles condamnations en dommages et intérêts et tous autres dommages matériels et moraux subis par l’État. Pour l’administration Moïse/Lapin, « ce sont de graves violations punies par le Code civil et le Code pénal haïtien ».
Dans la foulée, la compagnie dirigée par les Vorbes, a annoncé hier lundi 4 novembre, un rationnement « drastique » d’électricité dans la région métropolitaine de Port-au-Prince. « A partir de 7 heures du soir, hier, nos moteurs arrêteront de tourner, en raison de l’épuisement du stock de 200 mille gallons de mazouts, mis à la disposition de la Sogener par l’Electricité d’Haïti », a écrit sur Twitter Dimitri Vorbe, vice-président de la compagnie.
Alors que l’Etat haïtien multiplie ses attaques, les avocats de la compagnie planifient leur défense et se disent prêts à aller jusqu’au bout. « Le gouvernement, à travers l’ED’H, doit prouver par devant la justice les cas de surfacturation, de dol, d’escroquerie et d’abus de confiance évoqués », a déclaré Me Jean Danton Léger, avocat de la Sogener. Intervenant sur une station de radio de la capitale ce mardi, Me Léger qui est également membre de l’opposition, dénonce ce qu’il appelle une « vaste campagne de persécution politique », perpétrée contre son client.
Entretemps, les avocats engagés par l’Etat haïtien, parmi eux Me Newton St Juste, affirment être bien armés pour attaquer les contrats de fourniture d’électricité, particulièrement celui de la Sogener. Par cette démarche, ces hommes de loi veulent forcer à des compagnies privées, de restituer à l’Etat plusieurs millions de dollars américains, couvrant la période allant de 2005 à nos jours.